Un funambule sur le sable

08:25

 de Gilles Marchand


« C'est l'histoire de Stradi qui naît avec un violon dans le crâne. A l'école, il va souffrir à cause de la maladresse ou de l'ignorance des adultes et des enfants. A ces souffrances, il va opposer son optimisme invincible, héritage de ses parents. Et son violon s'avère être un atout qui lui permet de rêver et d'espérer. Roman de l'éducation, révérant la différence et le pouvoir de l'imagination. », Un funambule sur le sable, édition Aux forges de vulcain

La mer à l'horizon. Le vent s'engouffre sous les vêtements et glisse sur la peau. Il siffle dans les oreilles. Est-ce vraiment lui qui produit ce bruit chuchotant ? N'est-ce pas le grincement d'une corde ? N'est-ce pas le son scintillant qui éclate au coup d'archer ? Un violon dans la tête. Une jolie image pour décrire un rêveur. Un assemblage étrange de mots pour parler d'un fou. Pour le héros de cette histoire, pas de sens figuré, c'est une réalité. Il est Stradi, le garçon avec un violon dans la tête.

Un funambule sur le sable. Un acrobate qui chavire entre normalité et extraordinaire, soutenu par les cordes de son violon prêtes à trembler, à craquer à tout moment. Le récit s'ouvre sur un enfant avec un violon dans la tête qu'on transporte d'hôpitaux en hôpitaux. "Extraordinaire !" "Incroyable !" "Du jamais vu !" Les mêmes interjections et la même réponse "il n'y a rien à faire". Enfermé dans son cocon familial : un père inventeur, fou de science et grammaire, une maman dévouée et amoureuse des livres et un grand frère intrépide. Une seule visite de l'extérieur : la gentille infirmière et sa piqûre porteuse d'une douleur stridente. Le violon de Stradi chante suivant ses émotions, improvise une série de notes toute la nuit. Les vacances à la mer. L'unique moment de l'année où l'instrument se tait, s'efface face aux chants des vagues. Le temps d'un été, le silence s'installe dans sa tête. Puis en septembre : les cordes se réveillent, Stradi passe ses journées dans les pages d'un livre ou partage de longues conversations avec des oiseaux. Une autre particularité de son violon. Puis la vie s'immisce dans cette tranquillité. Le collège. Le regard des autres. Les jugements. Les invitations d'anniversaire jamais reçues. L'amitié. Le lycée. Les premiers sentiments. L'indépendance. Les premiers boulots. La vie couple. La vie de famille. Et toujours la mélodie d'un violon en fond. L'histoire d'une différence, d'un don raconté sur une longue partition de vie.

J'ai ouvert les pages de ce roman à l'aveuglette. Sans attentes ou scénario préconçu. Un personnage avec un violon dans la tête ? Drôle d'idée ! Pendant plusieurs chapitres, j'ai douté : est-ce une métaphore ? une interprétation de la folie ? Non, juste un petit instrument de musique logé dans une boîte crânienne. Et alors tout est devenu doux, magique et musical. Je me suis très vite attachée à Stradi - d'ailleurs on ne le connaît qu'au travers de ce joli surnom- : un jeune garçon timide, rêveur et courageux. On le suit à chaque étape de sa vie : sa première piqûre, sa première rentrée scolaire, son premier ami, son premier baiser. Quand ses parents découvrent effrayés ses conversations avec les oiseaux, quand à l'école il retient le son de son violon comme on retient son souffle ou quand son violon interprète les battements de son cœur. Poésie et émotion. Un roman à écouter. Entre les lignes, on imagine quelques notes de musique éclore par ci par là. Je ne me suis pas lassée de ce texte une minute.

Un funambule sur le sable, une partition sur la différence, l'extraordinaire, des notes qui résonnent toujours en fond, et, à chaque nouvelle étape, changement de portées, le tout sur des tons poétiques et attachants.

Gwendoline

★   ★ ✩ 

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